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villes rêvées, villes habitées

URBAN UTOPIAS

La Grande Motte – Brasília – Chandigarh

Stéphane Herbert & Carole Lenfant

Interview croisé du photographe Stéphane Herbert et de Carole Lenfant, commissaire de l’exposition

« villes rêvées, villes habitées / URBAN UTOPIAS / La Grande Motte – Brasília – Chandigarh » est un voyage entre trois villes architecturées et oniriques. Ces villes rêvées et construites par de grands architectes (Jean Balladur, Lucio Costa, Oscar Niemeyer, Le Corbusier) font l’objet d’un ouvrage (Somogy éditions d’Art) et d’une exposition présentée dans un lieu insolite : la péniche en béton aménagée par Le Corbusier en 1929 pour l’Armée du Salut, désormais classée Monument Historique et amarrée devant la Gare d’Austerlitz à Paris. Les photographies de Stéphane Herbert sont associées à une mise en regard des textes poétiques de Carole Lenfant. Patrimoine moderne, promenade urbaine, cosmogonie architecturale, l’exposition est également accompagnée d’une création sonore, d’une installation vidéo et de conférences.

Stéphane, Carole, comment avez-vous élaboré ce triptyque ?

 Stéphane Herbert  – Je travaille depuis plusieurs années sur les villes de Brasília (Brésil) et de Chandigarh (Inde). J’ai eu l’occasion de présenter une exposition sur ces deux capitales de la modernité dans une dizaine de villes en Inde ainsi qu’au Musée National à Brasília. En France, son itinérance a commencé par Firminy (Loire). En 2014, La Grande Motte m’a invité à exposer en plein air quelques-unes de mes images. J’ai aussi commencé à photographier cette cité balnéaire et je m’y suis assez rapidement attaché. Il y a évidemment une différence de statut entre ces trois villes mais le triptyque fait sens. J’ai invité Carole dont la clairvoyance et la profonde sensibilité ont stimulé un dialogue fructueux. Car ce projet constitue en effet une sorte de « tour de force » : c’est à dire une interaction entre photos de reportage et courts poèmes, permettant une approche originale de ces trois villes du patrimoine moderne dans trois pays aux antipodes. C’est un sacré voyage et nous avons opté pour le principe de la promenade urbaine, en toute simplicité comme lorsqu’on part à la découverte d’une ville, de son architecture et de ses habitants.

 Carole Lenfant  – De plus, nous avons convié deux chercheurs qui ont apportés un éclairage assez inédit sur ces trois villes oniriques. Fabienne Chevallier, historienne de l’art et de l’architecture, signe l’introduction de l’ouvrage : une synthèse sur les processus de résiliences propres à trois contextes historiques bien différents. Gilles Ragot, professeur en histoire de l’art contemporain, fait un brillant « focus » sur la démarche finalement très moderne de Jean Balladur, l’architecte en chef de La Grande Motte.

Mais quel est le rapport entre ces trois villes ?

 Carole Lenfant  – L’incroyable voyage que représente ce livre, ainsi que l’exposition éponyme, est celui d’une architecture vivante, celle où les éléments sont toujours présents, celle qui nous enracine, celle qui détermine une identité collective, matérielle, immatérielle, onirique et poétique. Certes, Chandigarh et Brasília sont un peu comme les « grandes sœurs » de La Grande Motte. Si elles ont successivement créé la surprise au moment de leur construction, elles furent aussi discréditées durant quelques décennies. Elles sont maintenant arrivées à maturité et, dans les trois cas, il s’agit de villes-parcs paysagers propices à la félicité. Alors, même s’il n’y a pas formellement de lien de parenté, la « station balnéaire » s’affirme aujourd’hui comme l’héritière des deux capitales symboles de la modernité. Des plages de la Méditerranée, nous pouvons convier les deux autres cités. Nous méditons alors sur la jeune civilisation qu’est le Brésil et sur l’Inde immémoriale. Trois continents, trois villes où la dialectique et le fantastique s’entremêlent. La Grande Motte, Brasília, Chandigarh restent toutefois des expériences uniques et permettent encore aujourd’hui la réflexion du « comment vivre la ville ? ». Ville invitant à d’autres sociabilités. Ville offerte aux citoyens. Ville ouverte aux horizons. Ville proposant une autre manière d’habiter sur la terre, sous le ciel. Serait-ce une forme de sérénité, de « sérénité urbaine », telle que la nomme l’architecte et urbaniste Lucio Costa ?

 Stéphane Herbert  – C’est par ailleurs le génie urbanistique de Lucio Costa et l’architecture emblématique d’Oscar Niemeyer qui permettront au Brésil de faire classer dès 1987 sa nouvelle capitale au Patrimoine Mondial, selon une norme très novatrice, puisque ce sont d’abord les différentes échelles de la ville qui sont protégées et non un style particulier. Quant à Chandigarh, elle devrait rejoindre en 2016 la liste prestigieuse de l’UNESCO dans le cadre d’un classement global de l’oeuvre de Le Corbusier regroupant plusieurs pays, ce qui serait d’ailleurs une première ! La Grande Motte, une des villes nouvelles les plus abouties de France, est labellisée Patrimoine du XXe Siècle depuis 2010, permettant ainsi une reconnaissance de l’oeuvre de Jean Balladur.

 Carole Lenfant  – Si nous distinguons les aspects oniriques de ces trois villes, il faut savoir qu’elles sont toutes trois, selon Fabienne Chevallier, le résultat de processus particuliers de résiliences historiques et politiques. Concernant Chandigarh, c’est à la suite de la partition de l’Inde en 1947, que Lahore, capitale historique de la vaste région du Pendjab, devient pakistanaise. Soucieux de conjurer le drame qui touche des millions de personnes et souhaitant symboliser la modernité de l’Inde indépendante, le premier ministre Jawâharlâl Nehrû sollicite en 1950 l’architecte Le Corbusier pour construire une ville nouvelle devant les contreforts de l’Himalaya. Le chantre de l’architecture moderne supervise pendant quinze ans la construction du complexe majestueux du Capitole ainsi que l’urbanisme général de la ville dont les principes de circulation et les conditions de nature concrétisent ses conceptions révolutionnaires. Souffrant d’une division administrative depuis 1966 entre les États du Pendjab et de l’Haryana, Chandigarh est cependant une ville tout à fait indienne, au même titre que d’autres villes, dites traditionnelles mais également planifiées, comme les cités de Fatehpur Sikri (XVIe siècle) ou de Jaipur (XVIIIe siècle). Pour Brasília, il s’agit d’un processus singulièrement plus long. La période coloniale et les affres hérités du système esclavagiste oblige le Brésil à se projeter vers l’avenir. Souhaitée dès l’indépendance du pays au XIXe siècle, la capitale est imaginée dans un mouvement d’intériorisation géographique du pays-continent. Toute l’audace du président Juscelino Kubitschek, la confiance lucide de l’urbaniste Lucio Costa, la poétique des courbes de l’architecte Oscar Niemeyer, et une remarquable dynamique toute brésilienne, seront nécessaires pour édifier à partir de 1956, cette ville au dessin exceptionnel sur les terres vierges du plateau central. Chantier titanesque de quatre ans, la nouvelle capitale est inaugurée en 1960. Si l’Axe Monumental se dote rapidement de symboles architecturaux puissants, le génie de Brasília repose sur les Ailes Résidentielles dont les bâtiments sont pratiquement tous sur pilotis et immergés dans une végétation luxuriante comptant pas moins de 4 millions d’arbres. La création de la cité balnéaire de La Grande Motte fut quant à elle décidée en 1963 par le président Charles de Gaulle. Édifiée sur un territoire ingrat du littoral languedocien, partie intégrante d’un plan d’aménagement de toute cette région, la « station » devait faire une place noble à l’habitat du tourisme social européen et porter en elle la vision optimiste de l’avenir des Trente Glorieuses. Offrir aux nouvelles générations la possibilité de passer des vacances au soleil donnait un sens, mais aussi un terme au souvenir des souffrances et privations de la Seconde Guerre mondiale. Jean Balladur, l’architecte en chef, y réalise une oeuvre totale vouée à un « idéal solaire » en dessinant pour le résidentiel de masse des pyramides modernes dans le secteur du Levant/Masculin et des conques ondulantes dans celui du Couchant/Féminin. Toute une symbolique sculpturale empreinte de poésie et de philosophie, entre plages et ombrages verdoyants. La Grande Motte prit son « indépendance » par référendum en 1974. Gilles Ragot nous explique que ces trois villes, de tailles et de statuts différents, ont en commun de renouer avec la dimension profonde de l’utopie telle que Thomas More la définissait au XVIe siècle, celle du dépassement d’une situation existante, d’un défi face au conformisme.

« villes rêvées, villes habitées » : pourquoi un tel aphorisme pour le titre de votre ouvrage et l’exposition ?

 Stéphane Herbert  – Il y a d’abord les allégories mythologiques : la divinité Chandi pour la capitale du Pendjab ; le songe de Don Bosco qui rêva d’un lac et d’une épopée « entre les 15e et 20e parallèles » du continent Sud américain ; le temple du Serpent à Plumes de la civilisation aztèque qui inspirera le dessin de la cité balnéaire entre Méditerranée et Pic Saint-Loup. Et puis il y a la genèse de ces villes : « Soleil, espace, verdure » (Le Corbusier). Une épopée lyrique de la modernité est engagée où les pionniers se disent : « Audace, énergie, confiance » (Juscelino Kubitschek). Forcément, durant quelques décennies, les sceptiques seront sceptiques… mais pendant ce temps les villes s’édifient progressivement et les arbres poussent. Elles arrivent à maturité en un demi siècle à peine. Maintenant, ça fonce ! Certes, il y aura toujours des problèmes à résoudre. Mais un décor heureux est planté où se manifeste « le spectacle des hommes et de la nature » (Jean Balladur). Ici se joue le paradigme sociétal des participations collectives et de la liberté individuelle. Cela peut être aussi le cadre de joies essentielles… De sentiments élevés… Du « devaneio » comme nous disons au Brésil… D’une certaine quiétude ou d’une humilité de l’être…

 Carole Lenfant  – C’est aussi un jeu de mot à double sens car ces villes sont évidement bien habitées : l’agglomération de Chandigarh compte une population de près de 3 millions d’habitants et celle de Brasília en compte 4 millions avec ses Villes Satellites ; La Grande Motte passe quant à elle de 10.000 résidents permanents à 120.000 vacanciers en période estivale et accueille 2 millions de visiteurs par an. Sur un autre plan, nous considérons qu’habiter ces villes n’est pas banal et que s’en imprégner est une expérience unique. Alors que l’architecture est conçue par l’humain et pour l’humain, celui-ci tend à disparaître dans nombre de photographies, dites d’architecture, pour laisser place à l’objet architectural. Figurer la présence humaine au cœur de la cité, au plus près de la volonté des architectes qui y ont œuvré. Renouer avec l’essence même des lieux. La justesse des proportions représentées par le photographe s’ajoute à la vision fonctionnaliste de l’architecte. Vous constaterez que l’architecture et l’humain sont indissociables dans l’approche photographique de Stéphane. Ne serait-ce que pour une question d’échelle. Mais surtout pour le mouvement et le dialogue qui composent ses images. Evidement, il faut respecter l’unité des lieux, leurs fonctions et comment les gens peuvent se les approprier. A La Grande Motte, Brasília ou Chandigarh, l’habitant et le visiteur ont la chance d’avoir à faire à des architectures qui vibrent et qui vivent. Des architectures habitées au sens pluriel du terme : humain, social et poétique. Pour chaque ville, Stéphane explore des lignes, des creux, des angles, des courbes, des traces. C’est au pas humble du voyageur qu’il capte dans leur densité les architectures et les êtres pour leur rendre hommage. Ainsi s’offrent en images des villes où l’on peut se retrouver disponible pour rêver, être habité et permettre cette forme de béatitude que procure la promenade urbaine. Accord architectural, temporalité des corps.

Et pour la signification de « URBAN UTOPIAS » ?

 Stéphane Herbert  – Cela veut tout simplement dire UTOPIES URBAINES, sauf que l’ouvrage est en français/anglais et que le terme UTOPIAS résonne plus joliment et raisonne plus clairement dans la langue de Shakespeare que dans la notre. C’est surtout dans le fond une idée que je porte depuis que j’ai commencé à photographier Brasília il y a presque une vingtaine d’années et qui motive une perception non figée du patrimoine moderne. On pourrait peut-être croire que j’ai tendance à « idéaliser » mais j’ai bien conscience des réalités, notamment culturelles et sociales qui se jouent au niveau de ces trois villes (peut-être l’objet d’un prochain ouvrage…). Ceci dit, il est dommage que le terme d’utopie soit par ailleurs souvent galvaudé. Je rappellerai juste une pensée de Le Corbusier : « Il est bon de savoir que l’utopie n’est jamais rien d’autre que la réalité de demain et que la réalité d’aujourd’hui est l’utopie d’hier. » Toutes proportions gardées, La Grande Motte, Brasília et Chandigarh sont toutes trois de formidables aventures architecturales et humaines. Conçues comme des utopies il y a quelques décennies seulement, le destin de ces trois villes, correspondrait-il à un rêve d’urbanité en ce début de XXIe siècle…?

Alors Stéphane, comment avez-vous photographié ces trois villes ?

 Stéphane Herbert  – Grâce à de la musique et grâce au vélo ! C’est fondamental pour circuler et découvrir la ville et ses habitants. Je voyage assez léger. Je ne suis pas un photographe d’architecture au sens où on l’entend généralement. Je viens plutôt du reportage, de l’anthropologie visuelle. L’aspect humain est donc essentiel dans mon approche de la ville. J’ai essayé de capter le rythme qui est particulier à chacune des trois villes en déambulant dans différents secteurs. Je peux agir sur le vif ou en attendant patiemment le passant, ce qui me donne aussi le temps d’apprécier la qualité du lieu. Je cherche à composer des images naturelles et spontanées, intégrant la dimension structurale et spatiale de la ville avec la présence humaine in-situ. Il y a des lignes, des formes, des attitudes, du mouvement : un gamin prend son élan vers la mer entre les pyramides Concorde et Commodore de La Grande Motte ; une adolescente traverse pieds nus la plateforme du Congrès et du Sénat à Brasília ; de vénérables indiennes drapées de cachemires éclatants se détendent sous le portique du Palais de l’Assemblée au coeur du Capitole à Chandigarh. La trame générale et l’articulation des images sont basées sur un jeu « ombre et lumière ». A La Grande Motte, Brasília ou Chandigarh, pas d’artifices. Il y a les modénatures pleines de fantaisie de Balladur, les courbes poétiques d’Oscar, les coffrages tactiles de Corbu. L’ombre est une trace sur la pierre flexible qu’est le béton : plasticité, tension, puissance, éclat. L’ombre fait aussi vibrer l’espace. Ombre et lumière, combinaison eurythmique pour saisir les formes, le volume et la matière de toute architecture. Partout, l’ombre est lumière. Mais pour le vivant, l’ombre est comme une trace du temps. Capter en une fraction de seconde un mouvement dans le flot de la vie peut déclencher une effusion silencieuse. « Quand le temps nous accable, une seconde nous sauve quelquefois. C’est le miracle de l’instant : être, voir, ou faire une photo. La photo est là, on la ramasse comme un galet sur la plage ; quelques fois, elle attend des années comme la Belle au Bois Dormant. (…) Nous avons évoqué des jardins, des rivages, des fenêtres, des visages. Nous savons aujourd’hui que l’instant nous sauve, en fait l’instant ne vieillit pas. (…) Tout se tresse par nos rencontres, nos coups de cœur. Instants sans rendez-vous, sans calcul. Rendons grâce à l’imprévu, à la spontanéité. » (Edouard Boubat)

Et vous Carole, qu’est ce qui a inspiré la composition de vos poèmes ?

 Carole Lenfant – J’ai eu la chance de rencontrer Stéphane en 2010 lorsqu’il m’a demandé une préface pour le vis-à-vis « Brasília Chandigarh ». La puissance évocatrice de ses photographies et les architectures oniriques qu’elles représentent donnent la possibilité de sentir en soi l’émergence des mots qui se réunissent avec humilité. Les images ont ce pouvoir magnifique d’ouvrir notre part de rêve, de solliciter l’imagination profonde de chacun. Ainsi, sur un sujet tel que « villes rêvées, villes habitées / URBAN UTOPIAS / La Grande Motte – Brasília – Chandigarh », ces villes solaires se révèlent ici dans des notions d’espace, de temps, d’humanité… mais aussi de liberté, de nature-paysage, de masculin, de féminin, formant une sorte de « cosmogonie architecturale » propices à la poésie. J’ai été particulièrement touchée par les écrits de Jean Balladur que j’ai découvert grâce à ce partage avec Stéphane mais aussi grâce à la rencontre avec l’artiste Michèle Goalard. Cette ballade entre les images et les mots raconte ainsi l’histoire de la naissance de villes et l’histoire des hommes qui l’habitent. « Il n’est pas de rêveur assez fou pour tenter de croire qu’il peut bâtir une ville. » (Jean Balladur)

Vous présentez cette exposition à Paris, dans un lieu exceptionnel, n’est-ce pas ?

 Stéphane Herbert  – Effectivement,il s’agit de la péniche en béton « Louise Catherine » aménagée par Le Corbusier en 1929 pour l’Armée du Salut grâce à Winnaretta Singer-Polignac, mécène d’exception. Amarrée devant la gare d’Austerlitz, la péniche était à l’abandon depuis 1995 mais un groupe de passionnés a eu le courage de la racheter pour la réhabiliter. C’est en chantier sur 70 mètres de long et il s’agit du seul bâtiment flottant de Paris classé Monument Historique. Cette péniche est une belle histoire en soit et c’est un cadre original pour une exposition sur trois villes du patrimoine moderne.

 Carole Lenfant  – Nous occupons une des trois nefs. Nous avons opté pour une scénographie correspondant à une atmosphère « chantier ». Sont présentées des photographies de Stéphane accompagnées de poèmes. Une programmation riche est également prévue, dont les conférences de Michel Cantal-Dupart, Fabienne Chevallier et Gilles Ragot, ainsi que la participation d’artistes invités : Fabrice Jünger, compositeur multi instrumentiste, qui propose une création sonore inspirée des photographies et des poèmes, ou encore Lucinda Groueff qui présente une vidéo-art sur les « sculptures à valeur d’usage » de La Grande Motte.

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Attaché de presse
Leila Neirijnck – Alambret communication

Interview with photographer Stéphane Herbert and curator of the exhibition, Carole Lenfant

« villes rêvées, villes habitées  /  URBAN UTOPIAS  /  La Grande Motte – Brasília – Chandigarh » is a journey between three architected and dreamlike cities. These dreamt cities constructed by great architects (Jean Balladur, Lucio Costa, Oscar Niemeyer, Le Corbusier) are the object of a book (Somogy éditions d’Art) and an exhibition presented in an unusual place: the concrete barge redesigned by Le Corbusier in 1929 for the Salvation Army, listed as a Historic Monument and moored next to the Gare d’Austerlitz in Paris. The photographs by Stéphane Herbert are connected with a poetic perspective by Carole Lenfant who added her texts. Modern heritage, urban walk, and architectural cosmogony at the same time, the exhibition is accompanied by a soundtrack, a video art, and lectures.

Stéphane, Carole, how did you go about with this triptych?

 Stéphane Herbert – For several years I have worked on the cities of Brasília (Brazil) and Chandigarh (India). I had the chance to present an exhibition of these two capitals of the modernity in about ten cities in India as well as at the National Museum in Brasília. In France, its itinerary began in Firminy. In 2014, the city of La Grande Motte invited me to exhibit in the street some of these pictures. I also began to photograph this seaside resort and I quickly became attached. There is obviously a difference in the status between these three cities, but the triptych makes sense. I invited Carole, whose perspicacity and deep sensibility stimulated a fruitful dialogue. The project effectively constitutes a sort of « tour de force« : This means an interaction between street photography and short poems, which allows an original approach on these three cities of modern heritage in three countries at odds. It is an amazing journey and we’ve chosen the principle of the urban walk – in all its simplicity – as a discovery of the city, its architecture, and its inhabitants.

 Carole Lenfant – In addition, we invited two researchers, who have shed new light on these three dreamlike cities. Fabienne Chevallier, art and architecture historian, signed the introduction of the book: a synthesis about the resilience processes specific to three different historical contexts. Gilles Ragot, professor of history of contemporary art, wrote a brilliant « focus » on the approach of Jean Balladur (chief architect of La Grande Motte) that is actually very modern.

But what is the connection between these three cities?

 Carole Lenfant – The amazing journey that this book represents, as well as the eponymous exhibition, is that of a living architecture, one in which the elements are still present, one that roots us, one that determines a collective identity, material, immaterial, dreamlike, and poetic. Certainly, Chandigarh and Brasília are a bit like the « older sisters » of La Grande Motte. Although they successively created surprises at the time of their construction, they were also discredited for several decades. They have now reached maturity, and all three cases are landscape city-parks that are “conducive to happiness”. So while there is no formal relationship between the three cities, the La Grande Motte is now establishing itself as the heir of the two capitals symbols of modernity. From the beaches of the Mediterranean Sea we can invite the other two cities. We can meditate on the young civilization that is Brazil, and on the immemorial India. Three continents, three cities, where the dialectic and fantastic intermingle. La Grande Motte, Brasília, and Chandigarh, remain unique experiences, and still today allow the reflection on « how does one live the city? ». A city inviting to other sociabilities, a city offered to the citizens, a city open to new horizons, a city offering another way to live on earth and under the sky. Would it be a form of serenity, an « urban serenity » as architect and town-planner Lucio Costa said?

  Stéphane Herbert – It’s also the urbanistic genius of Lucio Costa and Oscar Niemeyer’s iconic architecture that allowed Brazil to classify its new capital already in 1987 as a World Heritage. They did so in a very innovative norm, since they first protected the different levels of the city and not a particular style. As for Chandigarh, in 2016 it is supposed to join the prestigious list of UNESCO as part of an overall classification of the work of Le Corbusier in several countries. This would also be a first! La Grande Motte, one of the most successful modern towns in France, is labeled as “Twentieth Century Heritage” since 2010, allowing the work of Jean Balladur to be recognized.

 Carole Lenfant – If we distinguish the dreamlike aspects of these three cities, one must be aware that they are all the result of specific historical and political processes of resilience, according to Fabienne Chevallier. Chandigarh is a result of the partition of India in 1947, when Lahore, the historical capital of the vast region of Punjab, became part of Pakistan. Anxious to avert the tragedy that affected millions of people and wishing to symbolize the modernity of independent India, in 1950, Prime Minister Jawaharlal Nehru asked the architect Le Corbusier to build a new town at the foothills of the Himalayas. The pioneer of modern architecture supervised the construction of the majestic Capitol complex and the general town planning for fifteen years. The principles of traffic and the conditions of nature substantiated its revolutionary conceptions. Although it has suffered an administrative division since 1966 between the states of Punjab and Haryana, Chandigarh is nevertheless an Indian town like any other so called “traditional city,” such as Fatehpur Sikri or Jaipur that were planned in  the sixteenth and eighteenth centuries. For Brasília, the process was remarkably longer. The colonial legacy and the torments of the slavery system obliged Brazil to plan into the future. As desired since the country’s independence in the nineteenth century, the capital was imagined in a movement of geographic internalization of the country-continent. The audacity of President Juscelino Kubitschek, the clear-sighted confidence of the urban-planner Lucio Costa, the poetic curvatures of the architect Oscar Niemeyer and a remarkable dynamics throughout Brazil, were all necessary in 1956, for building this outstandingly drawn city on the virgin lands of the central plateau. After being a titanic construction site during four years, the new capital was inaugurated in 1960. Even if the ‘monumental axis’ rapidly adopted powerful architectural symbols, the genius of Brasília is based on the ‘residential wings’, whose buildings are almost all on stilts and immersed in lush vegetation with no less than four million trees. In the meanwhile, in 1963, the creation of the seaside resort of La Grande Motte was decided by President Charles de Gaulle. Built on barren land on the Languedoc coast, part of a development plan for the whole region, the « station » had to be a noble place for the habitat of the european tourism and carry within the optimistic views of the future thirty-year post-war boom. Providing to the new generations the opportunity to spend holidays in the sun gave meaning, but also an end to the memory of the suffering and hardships of the Second World War. Jean Balladur, the chief architect, achieves a total work dedicated to a « solar ideal”, drawing modern pyramids for mass housing in the sector of the Levant and undulated shells in the Couchant sector. It was a whole sculptural symbolism marked by poetry and philosophy, between beaches and green shading. La Grande Motte has won its « independence » by referendum in 1974. Gilles Ragot explained that these three cities, of different sizes and different statuses, reconnect with the deeper dimension of utopia defined by Thomas More in the sixteenth century, the one of exceeding an existing situation, and a challenge against the conformism.

« villes rêvées, villes habitées » or dreamt cities, lived cities: Why such aphorism for the title of your book and the exhibition?

 Stéphane Herbert – Firstly, there are the mythological allegories: the deity Chandi for the capital of Punjab; the dream that Don Bosco had of a lake and an epic « between the 15th and 20th parallels » of the South American continent; the Feathered Serpent of the temple of the Aztec civilization which inspired the design of the seaside town between the Mediterranean and the Pic Saint-Loup. And then there’s the genesis of these cities, « Sun, space, greenery » (Le Corbusier). A lyrical epic of modernity is committed where pioneers say to themselves: « Audacity, energy, and confidence » (Juscelino Kubitschek). Inevitably, for a few decades, skeptics were skeptical… but during that time the cities were built gradually and trees grew. The three cities have matured in less than half a century. Now it’s going fast! Certainly there will always be problems to be solved. But a happy scene is set where manifests « the show of the human and the nature ». (Jean Balladur). This plays on the societal paradigm of collective participation and individual freedom. This can also be part of essential joys… Lofty sentiments… The « devaneio » as we say in Brazil… A kind of silence or humility of being…

 Carole Lenfant – It’s also a play on words with double meaning, because these are obviously well-populated cities: Greater Chandigarh has a population of nearly 3 million inhabitants and that of Brasília counts 4 million with its satellite towns. La Grande Motte accounts for 10,000 permanent residents and 120,000 hosts in summer and it is visited by 2 million tourists a year. On another level, we consider that living in these cities is not trivial and it is a unique experience to immerse yourself in them. While the architecture is designed by humans and for humans, they tend to disappear in many architecture pictures giving way to the architectural object only. To figure the human presence in the heart of the city, closer to the will of the architects, who worked there. To reconnect with the essence of the place. The accuracy of the proportions represented by the photographer adds to the functionalist vision of the architect. You will notice that the architecture and the human are inseparable in Stéphane’s photographic approach. If it wasn’t a matter of scale. But especially for the movement and dialogue that compose his images. Obviously, we must respect the unity of the places, their functions and how people can appropriate themselves to them. La Grande Motte, Brasília or Chandigarh, the inhabitant and the visitor have the chance to get in touch with architectures that vibrate and live. Lived architectures in the plural sense: human, social, and poetic. For each city, Stéphane explores the lines, the hollows, the angles, the curves, and the traces. It is at a humble pace that he captures in their density the architecture and the people in order to honor them. Thus, we expose the cities in images, which are left open for dreaming, for living and for allowing this form of bliss that comes from urban walk. It is an architectural harmony, and a temporality of body.

And the meaning of « URBAN UTOPIAS »?

 Stéphane Herbert – The book is in French/English and UTOPIAS resonates more beautifully and reasons more clearly in English. It’s also basically an idea that I have had since I started photographing Brasília almost twenty years ago and it encourages an unfrozen perception of modern heritage. Perhaps you would think that I tend to « idealize », but I am well aware of the realities, including cultural and social ones that pass in these three cities (perhaps the subject of a forthcoming book…). That being said, it is unfortunate that the term utopia is otherwise often overused. I am just recalling a thought of Le Corbusier: « It is good to know that Utopia is never anything other than the reality of tomorrow and today’s reality is the utopia of yesterday. » Relatively speaking, La Grande Motte, Brasília, and Chandigarh are all three great architectural and human adventures. Discerned as utopias only a few decades ago, does the fate of these three cities actually correspond to a dream of urbanity in the early twenty-first century…?

So Stéphane, how did you photograph these three cities?

 Stéphane Herbert – With music and a bike! This is fundamental to move and explore the city with its inhabitants. I travel pretty light. I am not an architectural photographer in the ‘usual’ sense/ it is generally understood. I rather come from the what we call « street photography » and « visual anthropology ». The human aspect is essential for my approach to the city. I tried to capture the rhythm that is specific to each of the three cities wandering around in different quarters. I can act on the spot or wait patiently by the flow passing by. This also gave me time to appreciate the quality of the place. I try to compose natural and spontaneous images, integrating the structural and spatial dimension of the city with the human presence in situ. There are lines, shapes, attitudes, and movement: A kid is running towards the sea between the Commodore and Concorde pyramids of La Grande Motte; a young girl is crossing barefoot the platform of the Congress and Senate in Brasília; venerable Indian women wrapped in sparkling cashmere shawls are relaxing under the portico of the Assembly Palace in the heart of the Capitol in Chandigarh. The general frame and articulation of the images are based on a « light and shadow » play. In La Grande Motte, Brasília or Chandigarh, there are no tricks. There are decorative moldings fully based on Baldur’s fantasy, poetic curves by Oscar, and tactile forms by Corbu. The shadow is a trace on the flexible concrete: It embodies plasticity, voltage, power, brilliance. The shadow also makes space vibrate. Shadow and light is a eurythmic combination to capture shapes, the volume and terms of any architecture. Everywhere, the shadow is light. But for the living, the shadow is like a trace of time. Capturing a split-second movement of it in the flow of life can trigger a silent outpouring. « When time overburdens us, one second sometimes saves us. This is the miracle of the moment: being, seeing, or taking a picture. The picture is there, you pick it up like a pebble on the beach. Sometimes, it has waited there for years like Sleeping Beauty. (…) We discussed gardens, shores, windows, faces. Today we know that the moment saves us, in fact, the moment does not age. (…) Everything is interwoven in our encounters, our « coups de cœur« . Moments without appointment, without calculation. Let us thank the unexpected, and spontaneity. » (Edouard Boubat)

And you Carole, what inspired the composition of your poems?

 Carole Lenfant – I had the chance to meet Stéphane in 2010 when he asked me to write a preface for « Brasília Chandigarh ». The evocative power of his photographs and the dreamlike architectures that they represent give the possibility to feel the emergence of the words itself that come together with humility. Images have this wonderful power to open us for dreaming, to seek deep imagination. So on a topic such as « villes rêvées, villes habitées  / URBAN UTOPIAS / La Grande Motte – Brasília – Chandigarh », these solar cities are revealed here in notions of space, time, and humanity…but also of freedom, nature, landscape, male, female, and forming a kind of « architectural cosmogony » conducive to poetry. I was particularly touched by the writings of Jean Balladur that I discovered by this sharing with Stéphane, but also thanks to the encounter with the artist Michèle Goalard. This ballad between images and words tells the story of the birth of cities and the history of the people who inhabit it. « There is not a crazy enough dreamer to try to believe that he can build a city. » (Jean Balladur)

You will present this exhibition in Paris in an exceptional place, won’t you?

 Stéphane Herbert – Indeed, it is the concrete barge « Louise Catherine » transformed by Le Corbusier in 1929 for the Salvation Army thanks to Winnaretta Singer-Polignac, an exceptional sponsor. Moored near the Gare d’Austerlitz, the houseboat has been abandoned since 1995, but a group of people was zealous enough to buy it for rehabilitation. The vessel is 70 meters long and it is the only “floating building” in Paris listed as Historic Monument. This barge has a great story and it is in an original setting for an exhibition about three cities of modern heritage.

 Carole Lenfant – The exhibition occupies on of the three naves. We opted for a set design corresponding to a construction site atmosphere. Stéphane’s photographs will be presented together with poems. A rich program is also planned, including conferences of Fabienne Chevallier, Gilles Ragot and Michel Cantal-Dupart, as well as the participation of « invited artists » : the composer and multi-instrumentalist Fabrice Jünger, who offers a resounding creation inspired by photographs and poems, or Lucinda Groueff, who presents a video-art about the impact of « sculptures of utility-value » of La Grande Motte.

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Press agent
Leila Neirijnck – Alambret communication